#3
nov. 2023

L’automne est là, avec son lot de grisaille que ne dément pas l’actualité. Sous ces nuages, le FIL BLEU compagnie maintient le cap. Alors que s’achève une saison hyperactive marquée directement ( avec LE MIROIR A SONS ) ou indirectement ( avec PETITS MONDES ) par la figure de l’auteur-inventeur Raymond Roussel, notre équipe poursuit son chemin et précise le tir : 

Il s’agit toujours de se passionner pour les écritures de genre ㅡ thriller, science-fiction, fantastique

Il s’agit toujours de créer des récits originaux, pour mieux s’approprier le réel qui nous entoure et qui parfois nous mord

Il s’agit, encore et toujours, de questionner le moment théâtral à la lumière de ces arts si divers et si massifs qui participent à forger notre regard, et qui savent également si bien nous faire pleurer et nous faire rire : du cinéma aux jeux vidéos, du conte aux séries en passant par la musique… 

    

Alors que les liens en Dordogne s’ancrent et gagnent en force, l’urgence de travailler au contact direct des publics se confirme. Cela signifie maintenir une activité pédagogique dense, sur le département comme ailleurs. Cela signifie aussi se donner les moyens de diffuser là où les salles ne sont pas. La convivialité, au coeur du moment théâtral, prend les couleurs de la nécessité dans une période où des équipes artistiques comme la nôtre occupent un rôle toujours plus hybride entre création pure, intermédiaire des politiques publiques, enseignement et médiation, laboratoire d’action sociale… 

C’est ainsi que se dessinent deux lignes de force pour les saisons à venir : 

D’un côté, nous réunissons sous le nom de TEMPS PROCHES une série de lectures originales et d’initiatives de terrain. Tout cela est en ce moment même sur la table d’écriture. Mêlant écriture(s), jeu(x) et mise en musique, ces moments privilégiés sont pensés sous l’angle de la transversalité. Transversalité disciplinaire bien sûr. Transversalité géographique, afin de travailler là où sont les salles et là où elles manquent. Transversalité sociale enfin, afin de réunir des publics aux origines et aux intérêts variés. 

D’un autre côté, toutes ces initiatives ont des airs d’avant-goût. La poursuite de la fresque LES FEUX DU SOIR se fera nécessairement en salles, et le deuxième épisode de cette fresque s'appellera MAGALI. Après ses premiers pas en 2022, ce projet de grande dimension utilisera la forme du thriller pour interroger le devenir de la recherche fondamentale aujourd'hui... Le projet rentre dans un processus de production qui mettra plusieurs saisons à aboutir. Qu’à cela ne tienne : nous ne manquons ni de passion, ni de patience. 


A bientôt en Dordogne ou sur les routes !

#2
Août 2022

UNE SAISON COMMENCE ? Ou bien elle ne commence pas, elle dure, elle se poursuit sous un ciel étrangement chaud ? En 2022-23 le FIL BLEU compagnie s’élance vers de nouvelles créations, multiples, variées, mais avant de les noter il faut dire : le cap est ferme. 

A l’heure où notre équipe s’agrandit à de nouveaux interprètes, à de nouvelles collaborations, à cette heure particulière où nos demains se dessinent en Dordogne, le récit reste notre boussole. Notre but.
Oui des partenariats se créent, oui les expériences se multiplient, la route dit « émergence » comme on pourrait crier « terre, terre ! » et pourtant… le bois dont nous sommes faits se contente de murmurer qu’il vogue encore, avec toujours la même envie de partager : le fruits de ses heures à chercher le vent, les chants venus du pont, les histoires de la cale, et puis les cours de natation… 

EN SALLES, cette année se concentre sur LE MIROIR À SONS, adapté du roman de M. Patrice Trigano - lien -, déclencheur et soutien indéfectible du projet. Entre spectacle à tiroirs et tragicomédie où le plastique, le sonore, le dansé et le magique ont toute leur place, cette création nous déroute de notre fresque habituelle pour mieux nous amener dans le mille de nos obsessions : une écriture pluridisciplinaire par montage ( scénaristique ) et un théâtre de genre ( fantastique et science-fictionnel ).
Pourquoi ? Pour rester ensemble jouissifs et pertinents. Cet élan, il se fait grâce à la Gare Mondiale / Melkior Théâtre - lien -, et grâce à l’Agence Culturelle Dordogne-Périgord - lien.


EN SALLES AUSSI se prépare MAGALI, UN EPISODE DES FEUX DU SOIR. Suite d’une fresque, prologue de l’histoire d’ALICIA qui guette toujours sa reprise, ce nouveau spectacle s’échaffaude et prépare sa mise à flot à partir de la saison prochaine. Au programme ? Interroger la science, dans les fins fonds de ce qu'elle est, et de ce qu'elle devient.


HORS SALLES ET DANS LES ECOLES, c’est un autre rythme, certes aussi soutenu, mais encore plus irrégulier, passionnel, joyeux ? 

> Voilà Klore et nos deux Adrien lauréats du Création en Cours des Ateliers Médicis - lien - avec le projet PETITS MONDES. Ce sera en Corrèze, à la lisière de la Dordogne, à Louignac précisément. C’est un peu un rêve qui prend du muscle : produire ensemble un moyen-métrage, main dans la main avec une classe. Y mêler film de maquette et entretiens documentaires. L’écrire grâce au procédé littéraire au coeur du travail de Raymond Roussel, et aux fictions qui entourent les gamin.es. Quelle joie. 

> Il y a les projets encore en chrysalide : les lectures musicalisées, les ateliers d’écriture sur les marchés, les événements de proximité que l’on appelle « Temps Proches ». Tout cela se fera à partir de 2023 en contact, en valse, à l’unisson avec les territoires. 

> Et puis il y a la pédagogie : le travail avec les écoles de Bergerac, du primaire au lycée, les ouvertures aux habitant.es, ces mille moments qui font la vie d’une compagnie et le quotidien d’un département. 


EN SOMME le ciel a mis ses bijoux d’orage et pourtant, une voie se dessine peu à peu. L’occasion pour nous de dire une bonne fois pour toute : merci et merci encore. Aux artistes qui gravitent avec nous et maintiennent notre imagination dans une forme olympique. Aux producteur.ices et aux institutions qui accordent une valeur à nos désirs d’histoire. Aux publics, aux enseignant.es, aux maires, aux yeux qui brillent, justement parce qu’ils brillent, et que les jours trop longs se résolvent dans cette lueur-là.  

La Compagnie

#1
Fev. 2021

Nous voilà fondant une compagnie. Décidant de faire corps, en Dordogne comme ailleurs — et pourquoi ?

Pour raconter je crois.

Il y a ce petit mot tout simple, le mot récit. Il réunit nos arts et sans cesse il revient sur nos lèvres. Quand il faut juger la journée qui s’en va, il est là. Quand il faut saisir celle qui vient, il est là. C’est le désir de récit qui réunit nos spectacles, nos efforts, nos partages. 

Raconter, raconter, raconter.  

Dédiée à la création de fictions originales, notre équipe veut fabriquer un théâtre de montage. Parce qu’on ne raconte peut-être plus les histoires à notre siècle comme au précédent. D’ailleurs, à peu de choses près, on pourrait ne plus raconter du tout. Souvent l’encouragement est au réel brut, à l’autofiction, au cri parfois. Car c’est vrai qu’il va mal notre réel. Qu’il se chante en criant. Comme s'il appelait qu’on le panse. Qu’on l'éveille, qu’on le relève. 

Et nous disons : raconter y participe. 

Dans les théâtres bien sûr, sur les plateaux magiques, sous les rampes dernier cri. Mais partout ailleurs aussi. Le Fil Bleu Compagnie est indissociable d'une envie de raconter partout, dans les écoles, au bord des champs, dans les villages. Ancrée en terre rurale, présente souvent en espaces péri-urbains, notre équipe entend faire salle partout où les gradins manquent, et les où les plateaux reste à monter.

Un théâtre de montage ? 

Les arts de l’écran, le cinéma, le jeux-vidéo, la série... il suffit de regarder ces industries massives, leur portée et leurs drôles de manières : elles forgent chaque jour un peu plus nos regards d’humains, nos envies de spectateurs, nos rêves d’enfants — pour le meilleur et pour le pire. Alors notre compagnie naît avec l’envie de leur emprunter un peu de leur jouissance. Et avec le besoin de la comprendre, cette jouissance, dans ses faiblesses et dans ses recettes, dans son audace aussi. 

Une danse avec le diable ? Pourquoi pas. Mais comment espérer que nos salles fleurissent, qu’elles soient pleines et tonitruantes, si leurs codes et leurs références s’acharnent à former un monde à part ? Dans cette recherche de vitalité, je ne crois pas que le théâtre de création puisse rester encore longtemps une langue étrangère. A la recherche de méthodes nouvelles, de techniques rares, nous nous promettons de les mettre au service de ce moment commun qu'est un spectacle.

Alors nous décidons de chercher du côté d’un théâtre de montage, c’est-à-dire partout où le récit virevolte et se suspend, s’alterne, se compare, se contredit, se brise, reprend, s’étonne, s’emmêle et puis s’élance encore. Nous mettons au défi nos plateaux, nos techniques et nos imaginaires : il nous faut trouver la complicité du plaisir et de la pensée, de ce qui saisit et de ce qui compte.

Un théâtre de genre. 

C’est beau… mais quoi raconter alors ? Le hasard nous fait partager une certaine impatience d’enfant, un besoin de croisement, de crossover comme on dit. 

Le Far West au théâtre, ce serait quoi ? Et la Science-Fiction des aliens et des dimensions inconnues, celle des zombies et des robots ? L’épopée des Elfes et des Trolls, les boîtes magiques, les armes luisantes, ce serait quoi ? Le thriller et l'horreur ?

Et surtout, avant que leur élan ne s’épuise, la question n’est pas de savoir si ces univers "de genre" peuvent nous servir. La question est de trouver comment. Car chaque ailleurs éclaire l'ici. Car ces fables improbables, ces impossibles, ces jamais, ces même-pas-en-rêve, puisque nous les aimons, nous en apprennent plus sur nous que sur eux. Ces univers esquissent en creux nos possibles limités, nos probables déroutes. Depuis le fin voile de la fiction, ils nous interrogent sur les toujours qui nous encagent. 

Alors creuser du côté d’un théâtre de genre, avec ses couleurs et ses poncifs, ce n’est pas promouvoir l’exotisme bon-marché, l’oubli éphémère, les villages-vacance de l’imaginaire. C’est d’abord cesser de les nier ; c’est ensuite muscler ce qu’il y a de plus vital en nous, la capacité à vouloir, et la volonté de changer.

A l’heure d’écrire ces lignes, par un petit matin ironique, je ne peux que nous souhaiter quelques pas dans ce sens, et autant de plaisir à l’avenir qu’il y en a derrière nous. 


A. S